▌ ▌

Homepage

Accueil
méthode
animaux
ailleurs
occident
recommandations
conclusion
biblio

Comment dorment les enfants ailleurs ? Comment dormaient-ils autrefois en Europe ?
 
Deux comportements de l'enfant seront ici dissociés : le sommeil nocturne d'une part ; le sommeil diurne d'autre part. Le premier est associé au sommeil des adultes ; le second par contre se déroule alors que les adultes sont le plus souvent actifs, bien que dans de nombreux pays chauds, les adultes fassent la sieste.
 
Les observations s'attachent en général à décrire l'environnement matériel (type de couchage, localisation dans l'habitation) et les comportements associés au sommeil de l'enfant, c'est à dire son comportement propre (période de sommeil et d'éveils, analyse de paramètres physiologiques) et celui de son entourage (présence ou non de la mère, du père, de la famille, etc.).
 
Concernant le sommeil nocturne, les descriptions distinguent en général deux séquences consécutives : l'endormissement de l'enfant, période séparant l'état d'éveil du début du sommeil, et le sommeil nocturne de l'enfant proprement dit, jusqu'au réveil matinal définitif. Le premier épisode est court dans le temps et se place souvent dans le champ de l'action : les adultes sont actifs et mettent en place des stratégies plus ou moins longues et complexes pour arriver au résultat désiré. Le deuxième s'étend sur plusieurs heures, et plusieurs items pourront être renseignés : mobilier (lit, berceau, hamac, etc.) ; distance entre l'enfant et les personnes qui s'en occupe (sommeil solitaire ou partagé) ; cause, fréquence et déroulement des réveils. Cette période est plutôt considérée comme un état (l'état de sommeil) avec des éléments qui le consolident et d'autres qui l'interrompent.
 
Le sommeil diurne
Très souvent le sommeil diurne ne fait l'objet d'aucune attention particulière. En fait, le bébé s'endort sans aucune intervention extérieure, tout simplement parce qu'il est fatigué. Cela est particulièrement vrai dans les sociétés où le portage est une pratique répandue. Bercé par les mouvements du corps qui le porte, le bébé s'endort sans difficulté. Je n'ai rencontré aucune description précise de schémas de sieste dans la littérature, avec évocation de rythmes ou d'une éventuelle régularité, en dehors de notre culture. Nous avons tous vu un jour les images d'une mère africaine portant un bébé endormi dans son dos, la tête ballottant, et continuer à vaquer à ses occupations courantes . Une seule étude médicale fait référence au partage du lit durant la journée (17).
Ce manque de précision quant au rythme du sommeil dans la journée est-il la marque d'un désintérêt de la part des observateurs, le plus souvent des occidentaux ? Ou celui plus général de la part des personnes étudiées ? L'étude attentive de textes indigène permettrait peut-être de répondre à la deuxième question. Notons au passage qu'il est plus difficile d'établir une absence de discours que l'existence d'observations ou de recommandations ! Mais vraisemblablement, l'homme occidental se pose peu de questions à ce sujet quand il observe les autres sociétés, et son intérêt semble plutôt porter sur le sommeil nocturne qui est la source de tant de questions pour lui.
 
L'endormissement
L'enfant est en général endormi grâce à l'intervention d'un adulte, parfois d'un enfant plus grand. Dans certaines régions d'Afrique, une grande fille de 6 ou 7 ans sera chargée de s'occuper d'un plus petit, et entre autre de l'endormir. Mais c'est très souvent avec sa mère que s'endort le bébé africain (18). Il arrive également que l'enfant s'endorme sans action volontaire de la part de celui qui en a la charge : c'est valable le jour, mais également le soir.
Trois types d'actions sont le plus souvent la cause, volontaire ou non, de l'endormissement :
* La tétée au sein (dans les pays du Maghreb, en Inde, en Afrique, en Amérique du Sud, en Asie, …bref, finalement dans le monde entier) : le bébé tète et sombre dans le sommeil tout en poursuivant la tétée, avec un rythme et une puissance de succion s'affaiblissant. Celle-ci peut perdurer un certain temps quand le bébé dort, le sein dans la bouche.
* Le bercement : l'enfant est bercé par les mouvements du corps de celui qui le porte ou dans un dispositif adapté. Les bébés sont très souvent portés dans la journée par leur mère ou par un autre adulte, au moyen de dispositifs variés (tissus noués, liens, sacs, etc.). Comme nous l'avons déjà remarqué, il leur arrive alors de s'endormir sans intervention particulière. Mais le bébé peut être également bercé dans un hamac, très utilisé en Amérique du Sud, dans un Sari suspendu à un crochet en Inde, dans un berceau soit posé à terre soit suspendu en Europe ou en Amérique du Nord. Cela peut bien sûr être le cas le soir, et initier un sommeil nocturne.
* Les chants ou d'autres bruits produits par les humains facilitent également l'endormissement : claquement de langue en Afrique (chez les Pygmées, ce sont les pères qui se chargent de cette tâche), chants rituels un peu partout dans le monde, contes ou histoire chantée, musique instrumentale.
 
Ces trois types d'action peuvent être combinés, simultanément ou successivement (la mère donne le sein en se promenant et en chantonnant par exemple).
Un dernier type d'action reste à décrire, qui n'est pas très facile à observer. Il s'agit du simple contact du bébé avec un adulte allongé contre lui dans l'intimité d'une habitation. En d'autres termes, il arrive bien souvent que l'adulte et le bébé s'endorment ensemble, après avoir éventuellement utilisé une ou plusieurs technique décrite ci-dessus. Mais ne mettant pas en jeu de schéma d'actions et se déroulant à l'abri des regards, cette description n'a peut-être pas suscité d'intérêt chez les observateurs . Hélène Stork est la seule en France à porter un intérêt sur ce sujet : en comparant les pratiques française (à Paris), chinoise (Taïwan) et japonaise, elle a montré que les parents de ces deux dernières sociétés endorment leurs enfants en s'allongeant contre eux dans plus de 70% des cas. Et dans une écrasante majorité de plus de 90% des cas, un parent est présent lors de l'endormissement. Cette même étude montre que les objets dits " de transition " ne sont que très peu souvent utilisés (19).
 
L'environnement durant le sommeil : dispositifs matériels et présence humaine
En ce qui concerne le mobilier et l'utilisation ou non de certains dispositifs de couchage, il est peut-être utile de reprendre la classification de Mauss, et de différencier les cultures à berceaux et les cultures sans berceaux.
 
- sociétés à berceaux
Dans cette catégorie il convient de rassembler toutes les sociétés qui ont mis au point des systèmes permettant de maintenir un certain niveau de protection du bébé hors du corps d'un adulte (c'est à dire sans être porté ou attaché à un corps humain). Ainsi les hamacs, panier et autres objets permettant de poser ou suspendre le bébé, ont-ils des fonctions équivalentes au berceau rigide occidental, et permettent aux adultes de se décharger au moins partiellement de leur tâche de protection du bébé.
En France, les bébés ont souvent eu leur berceau, véritable carapace protectrice, où ils passaient parfois tout leur temps. Ils y étaient bercés et allaités, la nuit comme le jour. En Bretagne, au XIXe siècle, les bébés dormaient avec leurs parents dans des lits-clos, véritables placards fermés la nuit. Selon l'architecture de la famille, les lits étaient partagés de plusieurs façons, avec grands-parents, parents, enfants, servantes, … Ainsi tout le monde profitait de la chaleur emmagasinée. Dans le Morvan à la même époque, des lits-estrades pouvaient accueillir des familles entières. Pendant bien longtemps, les familles ont partagé les quelques lits de la maisonnée, quand ce n'était pas de simples bottes de foin ou paillasses, sans se poser de questions. Il n'est pas si loin le temps où les animaux partageaient le même toit que l'homme, la dispersion étant alors synonyme de danger, et la chaleur trop précieuse pour être gaspillée. Quand les familles aisées mettaient leurs jeunes enfants en nourrice, l'enfant dormait bien souvent avec cette dernière à proximité.
C'est à partir du Moyen-Age que l'église a demandé aux mères de ne plus faire dormir le bébé dans le lit de ses parents. Les grands lits collectifs ont laissé alors la place à des lits individuels. Il s'agissait officiellement de lutter contre les morts par étouffement (soi-disant des infanticides masqués) , mais également de limiter la promiscuité qui commençait à devenir immorale. Cependant au XVe et XVIe siècle, dans les familles pauvres, il est certain que les lits étaient encore partagés, " les parents gardant parfois un ou deux enfants dans le leur " (p.91, P. Dibie). Même chez les riches, passer des moments d'intimité partagée entre un parent et son enfant, n'était sans doute pas rare : les manifestations d'affection d'Henri IV pour son fils, le futur Louis XIII, sont connus, et se déroulaient parfois au lit. Au XVIIIe siècle, il est exigé des nourrices mercenaires qu'elles fassent l'acquisition d'un pare-feu et d'un berceau quand elles accueillent un " petit Paris " (20), ce qui prouvent qu'elles avaient tendance à les mettre dans leur lit. Les personnalités qui gouvernent (ou qui essayent de le faire) la vie quotidienne du peuple tentaient déjà de modifier ce comportement populaire qu'est le sommeil partagé. Comme nous le verrons plus loin, les choses n'ont guère changé depuis. Mais il faut remarquer tout de même qu'il n'était pas alors question d'éloigner le bébé dans une autre pièce.
 
L'utilisation d'un dispositif tel que berceau ou hamac décharge la mère d'une fonction de portage. Mais cette décharge est limitée. En effet, bien souvent le bébé restera tout de même dans le champ de vision d'un adulte ou d'un enfant. Et s'il arrive que ces dispositifs soient parfois utilisés pour que le bébé dorme sans surveillance une partie de la journée, la nuit par contre il ne sera jamais laissé seul. La fonction première de ces aménagements est de permettre aux parents de vaquer à d'autres occupations. Or la nuit, tout le monde dort, il n'y a donc aucune raison d'écarter le bébé. Que ce soit directement dans le lit de sa mère (notamment lors et après les tétées), ou dans son propre dispositif de sommeil, le bébé est à proximité. Ainsi, en Amérique du Sud, le hamac peut être familial et contenir 2 ou 3 membres d'une même famille (souvent le bébé et sa mère) durant la nuit. Le berceau du bébé occidental est posé tout contre le lit conjugal .
 
- société sans berceau
Dans les cultures dites " sans berceau ", bien souvent le bébé dort contre sa mère, très souvent par-terre, posé sur une simple natte. Cela peut être également avec un autre adulte ou un aîné (souvent une grande sœur). C'est le schéma classique en Afrique, mais également au Japon (tatami familial), en Océanie et dans le grand Nord des Eskimos.
 
La distinction entre culture à berceau et culture sans berceau ne permet pas d'identifier les sociétés dans lesquels les bébés dorment souvent avec un adulte, des autres.
Je n'ai pour ma part aucune description, ni ethnologique, ni historique, qui mentionne la séparation du nourrisson loin de sa mère ou de sa nourrice la nuit comme positive, en dehors de l'éviction du bébé de la couche (et non de la chambre) des parents en Europe à partir du Moyen Age. Bien évidemment ces descriptions manquent souvent de précisions (quant à l'âge des enfants par exemple) et n'ont pas la rigueur scientifique des études statistiques que nous affectionnons aujourd'hui. Cependant il est tout de même frappant de constater que de tout lieu et de tout temps, l'unique séparation adulte-bébé qui ait été décrite comme souhaitable consiste en une séparation de … quelques centimètres. C'est également le cas de sociétés qui imposent des séparations aux enfants âgés de quelques années : ainsi chez les Muria du sud de l'Inde, les enfants à partir de six-sept ans habitent dans le Ghotul, maison commune pour jeunes. En effet, cette société souhaite éviter aux enfants d'assister aux relations sexuelles de leurs parents … ce qui n'est pas sans rappeler notre propre culture. Mais pour les jeunes enfants, il n'est pas question de séparations.
 
Plusieurs chercheurs ont rassemblé des données concernant un grand nombre de sociétés non-industrielles. John Wihting a observé que la pratique consistant à écarter le bébé de sa mère prédominait dans les régions froides où l'utilisation des berceaux est plus fréquente (en dehors du cas des Inuit).
 

Nombre de sociétés observées

Observations

Référence

136

Bébé avec la mère sans le père : 50%Bébé avec mère et père : 16%

(21)*

172

Tous les bébés de toutes les cultures partagent le lit d'un adulte, parfois seulement durant quelques heures.

(22)*

53

49% des sociétés, lit séparé mentionné (le jour et parfois la nuit); 55% le partage du lit est mentionné ; 8 mentionnent les deux. Dans le cas du lit partagé, 65% des bébés dorment avec la mère, le reste avec les deux parents. Aucun cas de " chambre à part ". Allaitement à la demande jour et nuit.

(14)

186

Bébé dans le lit des parents : 46%Bébé dans la chambre mais pas dans le lit : 26%.Dans aucune société le bébé de moins de un an est séparé des deux parents.

(23)*

Tableau 3 : Pratiques de sommeil des nourrissons
* citées dans (24)
 
Les chiffres du tableau 3 démontrent que le sommeil partagé dans les sociétés traditionnelles est un comportement courant. Tous les bébés dorment dans la chambre des parents.
Une grande enquête a été menée en 2000 sur quatre continents pour analyser le comportement nocturne des bébés, et notamment étudier la fréquence du sommeil partagé (lit partagé et chambre partagée) pour les bébés de 3 mois (25). Les résultats concernant les pays hors de l'Europe et de l'Amérique du Nord sont rassemblés dans le tableau 4.
 

Pays

Lit partagé (proportion dormant plus de 5 heures de cette façon)

Chambre partagée

Chine - Chongqing
- Pékin
88% (100%)
53% (95%)
99%
100%

Chili (Santiago)

53% (95%)

95%

Japon (Tokyo)

64% (95%)

93%

Hong Kong (population chinoise)

38% (78%)

85%

Argentine (Buenos Aires)

12% (-)

69%

Tableau 4 : Lit partagé dans plusieurs pays hors occident et Amérique du Nord
 
L'Argentine se démarque nettement des autres pays, avec un taux assez faible de lit partagé (12%) comme de chambre partagée (69%), ce qui traduit certainement une occidentalisation des mœurs. Au Japon, le bébé dort avec sa mère, alors qu'en Chine il dort avec ses deux parents.
D'autres études statistiques modernes abondent dans le même sens. En Afrique du Sud, 94% des noirs et 71% des métis pratiquent le sommeil partagé (26). En Inde, une étude en 1992 montre que 100% des enfants dorment avec un adulte (27). La totalité des enfants de moins de 2 ans dorment avec leurs parents chez les indiens Bororo du Brésil (28). Ils sont encore 81,5% à partager le lit de leurs parents entre 2 et 10 ans. Au Japon, une étude montre que 73% des enfants dorment contre leurs parents, le reste dormant à côté, sur un matelas séparé (29) . En Corée, entre 3 mois et 2 ans, 98% des enfants dorment avec un membre de la famille (30). A Hong Kong, en 1996, Nelson montre que 81% des bébés partagent la chambre des parents, que 32% dorment avec un parent, mais que seul 1/3 sont en contact direct (31). En Australie, les bébés aborigènes âgés de moins de 12 semaines partagent à 96% la chambre de leurs parents, 68% dormant dans le lit-même des parents (32). En 1995, les Maori de Nouvelle-Zélande dorment avec leur bébé à 65%, les habitants des Iles Pacifiques étant 73% à pratiquer le " partage du lit" (33). A Taïwan (Chine) et au Japon, 72% des enfants (âgés d'environ 18 mois) dorment avec leurs parents, et plus de 95% dorment dans leur chambre (19). La proximité entre l'enfant et sa mère, en grande partie due à l'allaitement au sein largement pratiqué dans ses sociétés, fait de la mère l'adulte de référence. Au Japon, les mères dorment avec leur bébé dans 85% des cas (29), une autre étude montrant que 23% des pères dorment ailleurs (34).
 
Le sommeil : fréquence des réveils
Le scientifique rigoureux va être déçu. En effet, il existe très peu de descriptions concernant les réveils nocturnes dans les pays non occidentaux ou dans nos récits historiques. Et encore moins de chiffres bien évidemment. Le plus souvent, c'est en terme de tétées nocturnes que pourront être évoqués d'éventuels réveils. C'est bien d'éventualité qu'il convient de parler, car, mais nous l'avons totalement oublié, un bébé peut très bien téter sans se réveiller, voire sans réveiller sa mère. C'est ce qui se passe habituellement quand la mère et le bébé dorment l'un à côté de l'autre. Donc même quand le bébé tète fréquemment la nuit, il n'est pas certain que nous pouvons parler là de réveils (c'est à dire d'un état de conscience physiologique tel que définit par nos indicateurs scientifiques).
Une étude récente sur l'allaitement des bébés du Ghana (Afrique), montre que le nombre moyen de tétées nocturnes pour des bébés âgés entre 6 et 12 mois est de 4 (35). L'observation de 10 nourrissons Kipsigis au Kenya en 1982 a montré que les réveils nocturnes persistaient durant toute la première année (36). Une étude en Corée montre que 83% des enfants de 3 mois à 2 ans se réveillent la nuit, 28% pleurent et 16% des mères s'en inquiètent (30). A Taïwan, 53% des bébés de 18 mois environ se réveillent plus de trois fois par semaine, mais seul 18% des parents considèrent que c'est un problème. Au Japon, 27% des bébés ont des troubles de sommeil (à l'endormissement ou durant la nuit), et 11% des parents s'en plaignent (19). Nugent reconnaît que les problèmes de sommeil ou de réveil nocturne ne sont pas une préoccupation au Japon, et que le sommeil partagé couramment pratiqué dans ce pays est sans doute la cause d'une absence de problèmes (29). Toujours dans l'étude déjà citée de Nelson (25), les bébés sont pratiquement tous l'objet de vérification durant la nuit, le plus souvent 2 ou 3 fois dans la nuit : ces chiffres traduisent très certainement des réveils et des appels du bébé.
 

Vérification du bébé (nombre de vérifications moyen)

Chine - Chongqing - Pékin

96% (3)95% (2)

Chili (Santiago)

98% (-)

Japon (Tokyo)

91% (2)

Hong Kong (population chinoise)

91% (3)

Argentine (Buenos Aires)

86% (3)

Tableau 5 : Lit partagé dans plusieurs pays en occident et Amérique du Nord
 
Des espacements intergénésiques de plusieurs années sont courants pour des populations ne disposant d'aucun moyen de contraception et ne pratiquant pas non plus d'abstinence sexuelle (c'est le cas des Kung d'Afrique australe par exemple). Cette donnée informe du caractère tout à fait habituel pour les jeunes enfants de ces populations de tétées suffisamment fréquemment la nuit pour diminuer notablement la fertilité de leur mère. Il peut être utile ici de détailler la technique de contraception baptisée MAMA par l'OMS et l'UNICEF, basée sur un allaitement exclusif à la demande, avec tétées fréquentes. Cette méthode en effet insiste sur le rôle déterminant des tétées nocturnes pour l'espacement des naissances. La MAMA concerne des bébés de moins de six mois : il est donc implicitement reconnu ici que des bébés de six mois tètent la nuit, et que le contraire n'est sans doute pas naturel.
Les descriptions historiques indiquent que le bébé était en général allaité la nuit au moindre réveil, qu'il partage le lit de sa mère ou qu'il soit couché aux côtés de son lit, dans son propre berceau.
 
En conclusion, en cas de sommeil partagé, les réveils tels que nous les concevons (c'est à dire appels du bébé totalement réveillé) sont soit peu fréquents soit peu remarqués. Tout simplement parce que le bébé dort la plupart du temps contre sa mère, en général jusqu'au sevrage, et qu'une tétée peut se faire quasiment en dormant et n'est pas identifiée comme un réveil. Mais il est également possible que des réveils nocturnes, avec appels et interactions en état d'éveil, soient jugés comme normaux et plutôt bien acceptés par la population, ce qui pourrait expliquer le silence qui les entoure (19).